Après quelques semaines de fermeture sanitaire, les musées rouvrent leurs portes et il redevient enfin possible de s’approcher physiquement des œuvres inspirantes et des objets de valeur, en dehors de nos écrans.
Je me questionne. Cette coupure forcée nous permettra-t-elle de mieux différencier une offre culturelle en mode présentiel (voir en vrai, ressentir et être dans une ambiance partagée…) d’une offre culturelle en mode digital (voir une représentation, interagir virtuellement, apprendre et partager son expérience…) ?
Pour arrêter d’opposer les deux modes. Pour proposer des complémentarités, des synergies et des passages de témoin entre les usages…
Pour éviter de pousser simplement des inventaires illustrés sur le web. Sans plus-value originale qui tire parti des possibilités spécifiques au digital, les visiteurs ne vont pas rester longtemps…
Quelle pourrait donc être cette plus-value originale ?
Sans aller chercher des fonctionnalités technologiques spectaculaires (comme la réalité virtuelle, la 3D ou la réalité augmentée), je crois qu’il s’agit dans un premier temps de réfléchir et de travailler autour de ces trois mots: générosité, transversalité et mises en relation.
L’informatique, ce n’est pas à la « source » du calcul, en réseau ?
Faire vivre une collection hors les murs
Quelle forme digitale pourrait prendre une mise à disposition vivante du savoir et des objets de valeur, hébergés traditionnellement derrière les murs des institutions culturelles ?
Après quelques mois de travail, j’ai le plaisir de partager ici le lien vers la plateforme Mirabilia (la version 1, qui va évoluer rapidement):
C’est quoi Mirabilia ?
Mirabilia est une initiative de médiation numérique portée par le Département de la culture et du sport de la Ville de Genève, regroupant différentes institutions à travers une démarche éditoriale forte: créer des collections thématiques autour d’objets et d’œuvres emblématiques, de manière transversale et associative.
En partant d’une thématique « prétexte », comme l’art de la séduction par exemple, les collaboratrices et collaborateurs des institutions genevoises réfléchissent collégialement aux objets et œuvres à regrouper, pour créer un ensemble surprenant et nouveau. Pour raconter ce qui lie.
Qui eût cru qu’il y avait des associations portant sur la séduction entre un miroir, une fleur et une sculpture ?
Le public peut ainsi découvrir des œuvres et des objets à travers ces mise en relations thématiques, tout en explorant les combinaisons diverses en jouant simplement avec les mots-clés. Mirabilia offre ainsi un voyage ludique à travers les trésors existant dans les institutions culturelles, en mélangeant généreusement les provenances et les attributs de valeur. Un tableau prestigieux peut ainsi partager la scène avec une plante disparue, dont la valeur n’est plus calculable.
C’est l’association à travers une étiquette (mot-clé, matériau, localisation, temporalité, etc) qui va générer la valeur pour le visiteur: le savoir lié à notre héritage culturel est donc bien vivant, et le public peut en être partie prenante.
Ce qui n’est logiquement pas possible dans les musées en mode présentiel peut le devenir, dans le monde digital… Du calcul, en réseau, au service du partage du savoir.
Ma contribution à ce projet
J’ai été contacté en début d’année pour aider l’unité de médiation numérique du Département sur les points suivants:
- Création des fiches dans la base de données, à partir des informations rassemblées en provenance des institutions.
- Travail éditorial portant sur les taxonomies (listes de mots-clés), pour créer des « grappes » de fiches selon des logiques objectives (type de matériaux par exemple) et des logiques subjectives (éléments importants de l’objet ou de l’œuvre).
Chemin faisant, le mandat s’est étendu avec ces points:
- Amélioration du flux de travail collaboratif, pour rendre plus efficace et précis tout ce travail et de création et d’éditorialisation. Mise en place d’un outil dédié, remplaçant un flux de travail compliqué et laborieux.
- Assistance et collaboration sur la promesse du site. J’ai pu aider le responsable du projet dans la mise en place des fonctionnalités, leur mise en place et finitions.
- Conception des algorithmes. Permettre de proposer des usages vivants et interactifs à partir des informations contenues dans la base de données.
- Collaboration sur la mise en ligne et les prochaines étapes. Mise en place d’un questionnaire et des pistes de développement pour la suite.
Je suis content de cette première version et de la manière dont nous avons pu collaborer avec toute l’équipe du projet. Et je me réjouis de la suite, en espérant que cette première mouture de la plateforme Mirabilia pourra générer des usages inspirants et ludiques, propres au monde digital…